"Il doit expliquer d'où vient exactement cette idée, a souligné M. Poilievre en conférence de presse. UNIS l'a-t-il appelé pour lui suggérer l'idée? L'a-t-il conçue lui-même? Est-ce ses proches qui avaient déjà été payés par l'organisme qui l'ont fait? On doit entendre le premier ministre répondre lui-même à ces questions."
S'il reconnaît qu'il est rare qu'un premier ministre comparaisse devant un comité parlementaire, M. Poilièvre juge qu'il essentiel que Justin Trudeau et Bill Morneau viennent répondre aux questions du comité puisque la controverse les concerne personnellement. Ils seront tous deux assermentés comme témoins.
"Il y a deux de façon de procéder, a expliqué M. Poilievre. Soit le premier ministre peut accepter volontairement de se présenter et de respecter l'invitation d'un comité parlementaire. C'est ce qu'il fera s'il n'a rien à cacher."
"On peut utiliser les moyens disponibles dans notre système parlementaire pour le forcer à répondre à nos questions. Cela prendrait plus de temps, mais cela pourrait être fait, ou on devra le faire, si le premier ministre se soustrait à l'obligation de rendre des comptes."
Les conservateurs devront compter sur l'appui du Bloc québécois et du Nouveau Parti démocratique pour y parvenir. M. Poilièvre ne leur a pas parlé des intentions conservatrices, mais il a tenté d'exercer une certaine pression en déclarant que "s'ils souhaitaient obtenir la vérité, ils voteraient en faveur de cette résolution".
Dimanche, le Bloc québécois n'a pas répondu aux demandes d'entrevue tandis que le porte-parole du NPD en matière de finances, Peter Julian, refusait de s'engager.
"Les néo-démocrates croient qu'il faut aller au fond des choses et plus nous recevrons de réponses, y compris de MM. Trudeau et Morneau, plus vite le public canadien sera informé, a-t-il déclaré. Les Canadiens veulent des réponses et ils doivent savoir que cela ne se reproduira plus."
Même si les partis d'opposition acceptent d'ordonner à Justin Trudeau de comparaître devant le comité en utilisant leur propre majorité à la Chambre des communes, rien ne garantit que cela se produira, soutient un expert des procédures parlementaires Philippe Lagasse, de l'Université d'Ottawa.
Bien que les élus puissent obliger un député à comparaître devant un comité, celui-ci _ et dans ce cas-ci, le premier ministre _ demanderait au président de la Chambre si la demande est appropriée.
"La Chambre peut dire qu'elle veut vraiment entendre cette personne et vouloir la forcer à comparaître, mentionne M. Lagasse, mais cela nécessiterait une décision du Président, selon toute vraisemblance."
Il fait aussi remarquer que le Parlement aura peu d'occasions pour régler ce problème puisqu'il ne devrait siéger que de trois jours au total d'ici le 21 septembre.
La controverse
M. Trudeau avait annoncé le 25 juin la création de la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. Il avait alors expliqué que des dizaines de milliers d'étudiants ayant des difficultés à trouver un emploi d'été en raison de la COVID-19 pourraient faire jusqu'à 500 heures de bénévolat pour gagner jusqu'à 5000 $ pour leurs frais d'études collégiales ou universitaires.
Le premier ministre a défendu la décision de son gouvernement en disant que ce sont des fonctionnaires fédéraux avait recommandé UNIS pour gérer la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. Mais la participation de M. Trudeau à des événements de l'organisme avait déjà soulevé des questions, avant même les révélations de la semaine dernière voulant que la femme, la mère et le frère du premier ministre eussent reçu des honoraires pour prononcer des discours lors d'événements organisés par UNIS.
M. Trudeau et son ministre des Finances, Bill Morneau, ont tous deux confirmé qu'ils ne se sont pas récusés du vote du conseil des ministres approuvant l'octroi du contrat à UNIS. L'une des filles de M. Morneau a prononcé des discours lors d'événements WE tandis qu'une autre est contractuelle pour l'organisation.
Le cabinet de M. Morneau a nié qu'il existait des liens entre la décision gouvernementale et le travail de ses filles.
Les conservateurs et les néo-démocrates ont réclamé que le commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique, Mario Dion, qui enquête déjà sur la question de savoir si M Trudeau a enfreint la Loi sur les conflits d'intérêts, se penche aussi sur le cas du ministre des Finances.
Le gouvernement et UNIS ont mis fin à l'entente le 3 juillet, privant l'organisme jusqu'à 19 millions $. C'est le ministère fédéral de l'Emploi et du Développement social qui s'occupe désormais du programme.