Premièrement, ces deux votes secrets visent des objectifs très différents. L'élection d'un Président constitue une obligation qui incombe à la Chambre des communes aux termes de la Constitution. Les articles 44 à 49 de la Loi constitutionnelle de 1867, le coeur de la Constitution, portent essentiellement sur l'élection du Président et sur les pouvoirs qui lui sont conférés. La procédure d'élection du Président a été élaborée dans les années 1980. À l'époque, les parlementaires souhaitaient élire le Président par un vote libre et équitable, et les règles ont été conçues de façon à ce que le Président élu ait la légitimité et la liberté de s'acquitter de façon décisive de l'important rôle qui lui incombe aux termes de la Constitution. Les parlementaires ont veillé à ce que les autorités les plus respectées de la Chambre dirigent l'élection pour qu'elle soit au-dessus de tout reproche. Afin que le Président bénéficie de la plus grande confiance possible de la Chambre qui l'a élu, le nombre de voix qu'il a obtenues lors du vote n'est pas divulgué pour éviter une contestation de son mandat.
J'estime que le projet de loi C-352 revêt une importance capitale, surtout pour les localités côtières directement touchées, mais je ne pense pas que la question de savoir s'il peut faire l'objet d'un vote soit aussi importante, sur le plan de la procédure ou sur le plan constitutionnel, que l'élection de la présidence. Lorsque ont été élaborées les règles précisant si les projets de loi d'initiative parlementaire peuvent faire l'objet d'un vote — c'est-à -dire 15 ou 20 ans après l'élection du premier Président par scrutin secret —, on ne considérait pas que cette question était aussi importante de le choix de la personne présidant l'assemblée législative du Canada. Dans les prochains jours, les députés devront décider si un projet de loi d'initiative parlementaire peut faire l'objet d'un vote à la Chambre. Or, cette question ne relève pas de la Constitution, mais plutôt du processus législatif qui s'applique aux initiatives parlementaires.
Comme vous le savez, monsieur le Président, à la Chambre, nous mettons aux voix beaucoup de projets de loi d'initiative parlementaire. Nous savons sur quoi porte le vote et nous obtenons les résultats de ce vote lorsqu'il a lieu, à l'instar des Canadiens. Nous apprenons combien de députés étaient favorables au projet de loi et combien y étaient opposés, et nous considérons généralement que la valeur numérique du vote est un exemple transparent et concret de la démocratie pour les Canadiens, ce qui contribue à accroître la confiance dans le système de gouvernement. À mon avis, monsieur le Président, il serait contraire à l'éthique, à la Chambre, de ne pas divulguer les résultats de n'importe quel vote faisant partie du processus législatif. La démocratie canadienne ne se résume pas uniquement à des représentants qui prennent des décisions; elle consiste à prendre des décisions de façon à donner confiance aux gens qui nous ont élus pour prendre des décisions en leur nom, et, pour ce faire, il faut faire preuve d'ouverture et de transparence.
À chaque étape d'un projet de loi, nous votons ouvertement et publiquement afin que nos concitoyens sachent de quelle façon a voté leur représentant. C'est aussi pourquoi le résultat final du vote est communiqué immédiatement, comme on vient de le faire, afin que tous puissent voir le degré d'appui accordé à une question spécifique.
Le but du vote secret prévu par l'alinéa 92(4)b) du Règlement est de permettre aux députés de voter librement sans que le whip de leur parti puisse savoir comment ils ont voté. Cette façon différente de voter tire ses origines d'un désir de donner aux députés une plus grande latitude dans leur liberté d'expression quant aux affaires émanant des députés, et elle faisait partie d'une volonté de mieux distinguer les affaires émanant du gouvernement et les affaires émanant des députés lors des réformes de 2002 et de 2003. Ces changements ont été conçus dans l'esprit de les séparer clairement, autant sur le plan de la procédure que sur celui du contenu.
Parmi les autres éléments de cette réforme, il y avait la création de la loterie des députés, l'exclusion des ministres et des secrétaires parlementaires du processus, la méthode différente utilisée pour faire voter les députés à la Chambre et l'établissement de l'ordre de priorité séparé des affaires gouvernementales. C'est dans cet esprit que l'alinéa 92(4)b) du Règlement a été créé.
À la page 32 de la deuxième édition de La procédure et les usages de la Chambre des communes, il est écrit que « Le gouvernement responsable a longtemps été perçu comme étant un élément essentiel des systèmes de gouvernement basés sur le modèle de Westminster. » Puis, il est dit que « le gouvernement responsable signifie qu'un gouvernement doit être à l'écoute de ses citoyens, qu'il doit fonctionner de façon responsable (en faisant preuve de constance dans l’établissement de ses politiques et de méthode dans leur application) et que les ministres doivent rendre compte au Parlement. » Pour qu'on puisse conclure qu'un gouvernement est responsable, je suis d'avis qu'il doit absolument être ouvert et transparent.
Comme le processus d'appel que nous entreprenons cette semaine, par voie de scrutin secret, à partir de demain, est le premier en son genre à être tenu ici, il est tout à fait acceptable que vous déterminiez comment le résultat de ce vote devrait être communiqué, non en fonction de la pratique suivie pour l'élection du Président, pour les raisons que je viens de donner, mais, dans la mesure du possible, en fonction des règles sur la clarté et la transparence que nous suivons dans le processus législatif. Il vous appartient, monsieur le Président, de faire entendre l'esprit dans lequel cet article du Règlement a été rédigé. Je demande donc que, comme pour toutes les autres parties du processus législatif, le résultat du vote sur la possibilité de mettre aux voix le projet de loi C-352 soit rendu public.